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Le nu-propriétaire n’est propriétaire des constructions édifiées par l’usufruitier qu’à l’extinction de l’usufruit

Le droit d'accession du nu-propriétaire du fonds sur lequel l'usufruitier édifie une construction nouvelle n'opère, en l'absence de convention réglant le sort de cette construction, qu'à la fin de l'usufruit.

C’est à propos d’un problème d’assurance que la Cour suprême est appelée une nouvelle fois à prendre parti sur la délicate question des prérogatives des titulaires de droits démembrés sur la construction édifiée par l’usufruitier. La jurisprudence avait eu l’occasion de s’exprimer à propos d’un problème fiscal que posait ce démembrement. Il est en effet fréquent que des parents donnent à un ou plusieurs de leurs enfants la nue-propriété d’un terrain et y édifient ensuite une construction à leurs frais, de sorte qu’elle devienne, à l’extinction de l’usufruit, la propriété des enfants sans avoir à supporter de droits.

Dans un cas semblable, l’administration avait voulu taxer l’avantage indirect constitué par la construction au motif que tout ce qui s’unit et s’incorpore à la chose appartient au propriétaire et que l’accession s’opère de plein droit sauf convention contraire, et que ces principes s’appliquent que les constructions aient été édifiées par le propriétaire ou par un tiers. La cour d’appel, dont la décision était confirmée par la Cour de cassation, annulait le redressement au motif qu’il n’existait aucun enrichissement pour le nu-propriétaire qui n’entrera en possession des constructions qu’à l’extinction de l’usufruit (Cass. 3e civ., 19 sept. 2012, n° 11-15.460, n° 982 P + B). Certains commentateurs à l’époque avaient considéré qu’il s’agissait d’une application classique de l’article 599 du code civil qui refuse à l’usufruitier tout droit à indemnité pour les améliorations qu’il a effectuées et assimile les constructions aux améliorations (Dalloz Étudiant, 16 oct. 2012).

La solution était cependant fondée sur l’époque de l’accession, et à cet égard un nouvel arrêt de la troisième Chambre civile tranche la difficulté de manière beaucoup plus claire. Une personne avait fait construire une piscine sur un terrain dont elle était usufruitière, la nue-propriété appartenant à une SCI. Se plaignant de désordres, la SCI avait, après expertise, assigné les constructeurs et leurs assureurs en indemnisation. La cour d’appel avait déclaré l’action irrecevable au motif que l’article 1792 du code civil engage la responsabilité du constructeur envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage. La notion de maître de l’ouvrage n’est définie que de manière imprécise mais l’article 1711 du code civil, en désignant « celui pour qui l’ouvrage se fait », paraît bien désigner le propriétaire des ouvrages, et c’est la notion que retenait en l’espèce la cour d’appel qui en déduisait que la SCI n’en était pas propriétaire jusqu’à l’extinction de l’usufruit.

La décision est confirmée par la Cour de cassation qui déclare donc irrecevable l’action engagée par la SCI. L’affirmation est donc désormais claire, l’usufruitier seul constructeur est l’unique propriétaire des constructions édifiées jusqu’à l’extinction de l’usufruit, et dès lors qu’à cette date l’article 599 du code civil, que la Cour de cassation a étendu aux constructions, conduit à refuser à l’usufruitier toute indemnité, le nu-propriétaire ne peut, toujours évidemment sous la réserve de l’abus de droit, être imposé sur leur valeur.

Cass. 3e civ., 13 avr. 2023, n° 22-10.487, n° 271 B – Site EditionsLégislatives 07/07/2023

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