La méconnaissance, en cours de bail, du dispositif du contrôle des structures ne constitue pas un motif de résiliation prévu par la loi.
Le décès du preneur ne met pas fin au bail rural, mais sa transmission déroge, le cas échéant, aux règles normales de la dévolution successorale. En effet, le bail continue indivisément au profit du conjoint, du partenaire d’un PACS, des ascendants et des descendants qui remplissent la condition de participation à l’exploitation (C. rur., art. L. 411-34, al. 1er). Dans ce cas, la transmission du bail intervient automatiquement au profit de ces ayants droit.
Si aucune des personnes énumérées ci-dessus ne remplit la condition d’exploitation prévue par la loi, le bail est alors transmis conformément aux règles de droit commun établies par le code civil. Il passe ainsi aux héritiers du preneur ou à ses légataires universels. Il convient toutefois que ces derniers présentent une situation régulière au regard du contrôle des structures des exploitations agricoles. A défaut, la continuation du bail au profit de l’ayant droit du preneur décédé ne peut intervenir et l’absence d’exercice par le bailleur de son droit légal de résiliation est indifférente à cet égard. Toutefois, dans une décision postérieure en date du 20 juin 2019, la Cour de cassation avait précisé que la méconnaissance, en cours de bail, du dispositif du contrôle des structures ne constitue pas un motif de résiliation prévu par la loi.
Cette limite très stricte portée à l’action du bailleur en résiliation du bail, fondée sur la méconnaissance des articles L. 331-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime par l’ayant droit du preneur décédé, est à nouveau rappelée, dans les mêmes termes, par un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 13 avril 2022. L’espèce se résume simplement.
Un bail rural est consenti sur diverses parcelles à un agriculteur. A la suite du décès de ce dernier, le propriétaire bailleur délivre un congé rural pour défaut d’autorisation d’exploiter aux héritiers du premier preneur décédé et leur enjoint de quitter les lieux à la fin de l’année culturale. C’est dans ces conditions que la sœur du preneur décédé saisit le tribunal paritaire des baux ruraux en reconnaissance de son droit à la poursuite du bail recueilli dans la succession de son frère. En réplique, la propriétaire bailleur forme une demande reconventionnelle en résiliation du bail invoqué par la sœur du défunt.
Cette demande est rejetée en cause d’appel. Au soutien de leur décision prononçant la résiliation du bail consenti au preneur décédé, les juges du second degré retiennent que l’action de la bailleresse n’est pas enfermée dans le délai de forclusion de 6 mois prévu à l’article L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime, dès lors que le motif de cette résiliation tient à la non-conformité de la situation de l’héritier du preneur décédé aux règles du contrôle des structures.
Ainsi motivée, la décision attaquée s’exposait immanquablement à la censure. La Cour de cassation la prononce effectivement, pour violation de la loi, sur le visa des articles L. 331-6, L. 411-31 et L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime. Les Hauts magistrats rappellent, en effet, que la méconnaissance, en cours de bail, du dispositif de contrôle des structures ne constitue pas un motif de résiliation prévu par la loi.
Cass. 3e civ., 13 avr. 2022, n° 20-17.511, n° 323 F-D
Site EditionsLégislatives 24/05/2022