L’action en paiement des salaires dont le versement doit être repris à l’issue du délai d’un mois suivant le constat d’inaptitude du salarié est soumise à la prescription des créances salariales.
Dans un arrêt du 7 mai 2024, la chambre sociale de la Cour de cassation se prononce, pour la première fois, sur le point de départ du délai de prescription applicable à l’action en paiement des salaires dont le versement doit être repris par l’employeur lorsque le salarié n’est pas reclassé, ni licencié, à l’issue du délai d’un mois à compter de la date de constat de son inaptitude.
L’employeur n’a pas respecté son obligation
L’employeur est tenu de verser au salarié victime d’une maladie ou d’un accident non professionnel, qui n’est pas reclassé dans l’entreprise à l’issue du délai d’un mois à compter de la date de l’examen de reprise du travail ou qui n’est pas licencié, le salaire correspondant à l’emploi qu’il occupait avant la suspension de son contrat de travail (C. trav. art. L 1226-4).
En l’espèce, une salariée déclarée inapte à son emploi par le médecin du travail le 3 juillet 2012 avait été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 12 septembre 2013 sans que l’employeur ait respecté son obligation précitée de reprise du versement du salaire passé le délai d’un mois. L’intéressée avait engagé, le 1er mars 2016, une action judiciaire en paiement des salaires pour la période du 3 août 2012 (expiration du délai d’un mois après la constatation de l’inaptitude) au 12 septembre 2013 (date de la rupture du contrat de travail). Mais en vain, y compris devant la cour d’appel. Celle-ci a déclaré l’action prescrite au motif que le point de départ du délai de prescription, qui est celui applicable à la demande en paiement des salaires, soit 3 ans, était le 3 août 2012, de sorte que la salariée devait agir avant le 3 août 2015. Cette décision est cassée.
Le régime de prescription des créances salariales est applicable
La chambre sociale décide que l’action en paiement des salaires dont le versement doit être repris par l’employeur à partir de l’expiration du délai d’un mois suivant la déclaration d’inaptitude court à compter de la date d’exigibilité de chacune des créances de salaire dues jusqu’à la rupture du contrat de travail.
Dès lors, en l’espèce, la salariée pouvait agir jusqu’au 13 septembre 2016 et son action engagée le 1er mars de cette même année était donc recevable.
En effet, la rémunération dont le versement doit être repris conserve la nature de salaire. Par ailleurs, selon la jurisprudence, la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance invoquée. Par conséquent, doit être appliqué le régime de prescription des créances salariales : le délai de prescription court à compter de la date à laquelle la créance est devenue exigible et, pour les salariés payés au mois, la date d’exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise et concerne l’intégralité du salaire afférent au mois considéré.
A noter : La chambre sociale ne pouvait pas retenir un délai de prescription unique, à savoir la date d’expiration du délai d’un mois après la constatation de l’inaptitude, s’agissant d’une créance à exécution successive, exigible chaque mois, à la date habituelle de paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise.
Cass. soc. 7-5-2024 n° 22-24.394 F-B – L’@ctualité en ligne, www efl.fr 11/06/2024