La chambre sociale de la Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 18 septembre 2024, que l’ouverture d’une unité de vie Alzheimer ne relève pas d’un surcroît temporaire d’activité mais s’intègre, au contraire, dans le cadre de l’activité normale et temporaire de l’association qui l’a créée.
Le surcroît temporaire d’activité, motif de recours au CDD
Le recours au contrat de travail à durée déterminée (CDD) ne doit pas avoir pour objet ou pour effet de pourvoir un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise (C. trav. art. L 1242-1). Un tel contrat ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas définis par l’article L 1242-2 du Code du travail, comme un accroissement temporaire d’activité.
La Cour de cassation juge traditionnellement que le lancement d’une nouvelle activité ne permet pas à l’entreprise de justifier le recours au CDD pour surcroît temporaire d’activité. A minima, ce lancement ne permet pas « à lui seul » d’y avoir recours, comme l’a précisé la Cour dans une espèce qui concernait le lancement de nouveaux produits. Dans ces cas, le contrat encourt la requalification en contrat à durée indéterminée (CDI).
La présente affaire constitue une nouvelle illustration de cette jurisprudence.
L’ouverture d’une unité de vie Alzheimer…
En vue de la création d’une unité de vie Alzheimer, la Fondation de Rothschild avait conclu 3 CDD pour accroissement temporaire d’activité avec un médecin gériatre. Les contrats couvraient les périodes, pour le premier du 19 mai au 31 août 2014, renouvelé jusqu’au 31 octobre 2014, pour le deuxième du 16 au 27 mars 2015, et pour le troisième du 18 mai au 30 septembre 2015, renouvelé jusqu’au 31 janvier 2016. Contestant la rupture du dernier contrat quelques jours avant son terme, le médecin avait saisi le conseil de prud’hommes pour demander la requalification de ses CDD en CDI.
… ne relève pas d’un accroissement temporaire d’activité
La cour d’appel l’avait débouté de sa demande en retenant que les 2 derniers CDD avaient été conclus au motif d’un « surcroît d’activité lié à l’ouverture d’une unité de vie Alzheimer ». Elle avait en outre constaté que :
– l’employeur justifiait de réunions préparatoires concomitamment à sa collaboration avec le salarié, notamment en mars 2015 et en janvier 2016, pour le projet d’organisation de l’unité de vie adaptée (UVA), qui avait comporté des aspects architecturaux comme la création d’une unité sécurisée, mais qui avait requis également des ressources, du personnel médical et paramédical spécifiquement formé, et la mise en place d’une organisation dédiée ;
– l’unité de vie adaptée avait ouvert en mars 2016, accueillant 14 résidents ;
– l’employeur démontrait un surcroît d’activité lié à « l’ouverture de l’unité de vie Alzheimer », cette expression pouvant s’entendre, dans les circonstances décrites et compte tenu des préalables nécessaires, comme le projet d’ouverture de ladite unité, peu important le lieu d’affectation du salarié, puisque le motif de recours aux contrats litigieux touchait l’ensemble de la structure.
Au contraire, pour la chambre sociale de la Cour de cassation, ces constats établissaient que le surcroît d’activité entraîné par l’ouverture d’une nouvelle unité, qui s’intégrait dans le cadre de l’activité normale et permanente de l’association, n’était pas temporaire. La demande en requalification devait donc être accueillie. L’arrêt est en conséquence cassé et l’affaire devra être rejugée.
Cass. soc. 18-9-2024 no 23-16.782 F-D, V. c/ Fondation de Rothschild
L’@ctualité en ligne, www efl.fr 30/10/2024