Un entrepreneur individuel pouvant désormais faire l’objet à la fois d’une procédure collective et d’une procédure de traitement de sa situation de surendettement, un Décret du 14 juin 2022, paru au Journal Officiel du 16 juin 2022 adapte notamment le contenu de la demande d’ouverture et précise l’articulation entre les deux procédures.
La loi 2022-172 du 14 février 2022 a réformé le statut de l’entrepreneur individuel, en prévoyant la scission de plein droit de son patrimoine entre biens personnels et biens professionnels (BRDA 6/22 inf. 20). Corrélativement, cette loi a modifié l’articulation des procédures de traitement de l’insolvabilité ouvertes aux entreprises (procédures collectives prévues au livre VI du Code de commerce : sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire, rétablissement professionnel) et aux particuliers (procédures de surendettement prévues au livre VII du Code de la consommation).
Un entrepreneur individuel peut ainsi faire l’objet, selon le cas (C. com. art. L 681-2 et L 681-3 nouveaux) :
– d’une procédure collective limitée à son seul patrimoine professionnel ou englobant son patrimoine personnel ;
– simultanément, d’une procédure collective et d’une procédure de surendettement ;
– seulement d’une procédure de surendettement.
Toute demande visant un entrepreneur individuel et tendant à l’ouverture d’une procédure collective ou de surendettement doit être portée devant le tribunal compétent pour connaître des procédures collectives (C. com. art. L 681-1 nouveau, al. 1) : tribunal de commerce si l’activité de l’entrepreneur est commerciale ou artisanale ; tribunal judiciaire dans les autres cas (art. L 621-2, al. 1, L 631-7 et L 641-1, I).
Le Décret qui précise les conditions d’application de ce nouveau dispositif vient d’être publié. Il est entré en vigueur le 17 juin 2022.
Demande d’ouverture d’une procédure collective ou de surendettement
La demande doit être présentée dans les mêmes conditions qu’une demande d’ouverture d’une procédure collective (C. com. art. R 681-1, I nouveau).
Toutefois, le contenu de la demande, lorsqu’elle émane de l’entrepreneur, est adapté : la situation de trésorerie, l’état chiffré des créances et des dettes, l’état actif et passif des sûretés ainsi que celui des engagements hors bilan et l’inventaire sommaire des biens du débiteur (cf. art. R 621-1 et R 631-1) doivent être présentés en distinguant les biens, droits ou obligations relevant du patrimoine professionnel et ceux relevant du patrimoine personnel. Doivent aussi figurer dans la demande les actes par lesquels l’entrepreneur a renoncé, à l’égard d’un créancier, à la protection de son patrimoine personnel, avec indication du nom du créancier concerné et du montant de l’engagement (art. R 681-1 nouveau, I). Doivent être ajoutées les informations et les pièces exigées en matière de surendettement (cf. C. consom. art. R 721-2 et R 721-3 : indication de la situation familiale, des procédures d’exécution en cours, y compris mesure d’expulsion de son logement, cessions de rémunérations consenties aux créanciers…).
L’entrepreneur peut solliciter, dans sa demande d’ouverture, le bénéfice des mesures de traitement de sa situation de surendettement (art. R 681-1 nouveau, II). Rappelons que la procédure de surendettement ne peut pas être ouverte sans l’accord de l’entrepreneur (art. L 681-2, IV et L 681-3, al. 1). Si ce dernier n’a pas fait de demande en ce sens, son accord peut être recueilli, précise le nouveau décret, lors de l’audience au cours de laquelle le tribunal examine la demande d’ouverture de la procédure collective (art. R 681-2 nouveau).
Suites de la demande d’ouverture
Le Décret apporte des précisions d’ordre procédural, notamment :
– c’est dans un même jugement que le tribunal apprécie si l’entrepreneur relève, alternativement ou cumulativement, d’une procédure collective et d’une procédure de surendettement (art. R 681-3 nouveau, al. 1) ;
– en cas d’application cumulative des deux procédures (ce qui suppose que les patrimoines professionnels et personnels de l’entrepreneur soient en difficulté et demeurés distincts), le jugement est notifié à l’entrepreneur et aux créanciers dont il a signalé l’existence (art. R 681-4 nouveau) ;
– dans la même hypothèse ainsi que dans celle où l’entrepreneur n’est éligible qu’à une procédure de surendettement (le tribunal renvoie alors le dossier à la Commission de surendettement), le jugement du tribunal est susceptible d’appel par les parties dans les 10 jours de sa notification (art. R 681-5 nouveau) ; un créancier non partie au jugement peut contester la séparation des patrimoines de l’entrepreneur dans un délai de 10 jours à compter de la notification qui lui a été faite, ou à compter de la publication du jugement au Bodacc (art. R 681-6 nouveau).
Décret 2022-890 du 14-6-2022 : JO 16 texte n° 17 – L’@ctualité en ligne, www .efl.fr 08/07/2022