Le projet de loi de finances pour 2025 reprend les annonces gouvernementales faites à la suite de la crise agricole du début de l'année 2024, notamment concernant les incitations fiscales à la transmission.
Le ministère de l’économie et, à sa suite, le ministère de l’agriculture ont dévoilé hier les principales mesures de soutien au secteur agricole qui seront portées dans le projet de loi de finances pour 2025. Celui-ci s’inscrit dans la continuité des promesses faites au monde agricole au début de l’année par le précédent gouvernement et constitue un gage de bonne foi. La patience des agriculteurs a en effet été mise à rude épreuve avec la dissolution de l’Assemblée nationale, qui a mis un coup d’arrêt à de nombreux projets dont la loi EGAlim 4 mais aussi la loi d’orientation agricole dont l’examen devrait reprendre « sans délai » comme l’a indiqué Michel Barnier dans son discours de politique générale.
Aménagement de la DEP
La déduction pour épargne de précaution (DEP) serait renforcée, en permettant l’exonération partielle à hauteur de 30% en cas de mobilisation de l’épargne pour faire face à un aléa sanitaire, climatique ou environnemental entraînant des pertes économiques remplissant les conditions pour ouvrir droit à une indemnisation par un fond de mutualisation (PLF, art. 18, I, 1°, III et IV). Sont visés les risques liés aux épizooties ainsi qu’aux infestations d’organismes nuisibles et l’indemnisation au titre de l’assurance récolte, de la solidarité nationale et des calamités agricoles. Un plafond maximal de déduction est toutefois fixé à 50 000 €.
Extension du dispositif en faveur des éleveurs de vaches
La déduction en faveur des stocks de vaches laitières et allaitantes serait étendue en vue d’inciter à l’accroissement du cheptel bovin français (PLF, art. 18, I, 2°). Ce dispositif temporaire a été mis en place par la loi de finances pour 2024 (L. fin. 2024 n° 2023-1322, 29 déc. 2023, art. 70). Pour les exercices clos du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2024, les exploitants agricoles, relevant du régime réel d’imposition dans la catégorie BA et détenant un stock de vaches laitières ou allaitantes, pouvaient déduire de leurs revenus 150 € par vache laitière ou allaitante en stock, dans la limite de 100 vaches, soit au maximum 15 000 € par exercice.
Ce dispositif devrait perdurer pour quelques années encore, le PLF prévoyant de l’appliquer pour les exercices clos à compter du 1er janvier 2024 et jusqu’au 31 décembre 2027. Il devrait en outre changer de forme, passant d’une déduction fiscale à une provision, ce qui aurait pour effet d’impacter non seulement le calcul du résultat imposable mais également celui des cotisations sociales. Si le plafond de 15 000 € par exploitation demeure, le chiffrage du stock à 150 € par vache disparaît pour laisser place à une évaluation de l’augmentation réelle de la valeur du stock.
En contrepartie, les éleveurs sont fiscalement incités à s’inscrire dans une démarche de contractualisation pluriannuelle telle que mise en place par les lois EGAlim. A défaut, le montant de la provision et le montant du plafond seraient minorés de 10 % au titre de l’exercice clos en 2025, de 20 % au titre de l’exercice clos en 2026 et de 25 % au titre des exercices clos à compter du 1er janvier 2027.
Hausse de l’exonération de TFPNB
Le dégrèvement de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) en faveur des terres agricoles serait relevé de moitié, soit de 20 à 30% (PLF, art. 18, II).
Encouragement fiscal à la transmission des exploitations
La transmission des exploitations agricoles au profit de jeunes agriculteurs s’installant pour la première fois serait encouragée (PLF, art. 19). Cette mesure fait dans une certaine mesure écho aux annonces de Bruno Le Maire, alors ministre de l’économie, au moment de la crise agricole de début 2024 concernant le relèvement de plusieurs seuils d’exonération.
L’exonération de plus-values professionnelles de l’article 151 septies du CGI serait ouverte aux JA en cas de cession à leur bénéfice de l’entreprise individuelle, d’une branche complète d’activité ou de l’intégralité des droits ou parts d’une société agricole réalisées au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2025 (PLF, art. 19, I, D et III, B). Les seuils de recettes passeraient dans ce cas de 350 000 € à 450 000 € pour une exonération totale des plus‑values de cession et de 450 000 € à 550 000 € pour une exonération partielle.
Le dispositif d’exonération des plus-values de cession d’entreprise en cas de départ à la retraite, prévu à l’article 151 septies A du CGI, serait ouvert en faveur des cessions aux JA en première installation (PLF, art. 19, I, E et III, B). Dans cette hypothèse, les cessions intégrales d’entreprise ou de parts, réalisées au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2025, pourraient être échelonnées sur une période maximale de 72 mois tout en conservant le droit à exonération d’impôt sur le revenu.
Dans le même esprit, l’abattement sur les plus-values pour les dirigeants de PME partant à la retraite serait revalorisé de 100 000 €, pour passer à 600 000 € lorsque la cession est réalisée au profit d’un JA bénéficiant des aides à la première installation. De plus, les cessions de droits ou parts pourraient être échelonnées sur 72 mois (CGI, art. 150-0 D ter ; PLF, art. 19, I, C, II et III, A). De ce fait, le dispositif qui devait s’achever au 31 décembre 2024 serait prorogé jusqu’au 31 décembre 2031. Il s’appliquerait aux cessions intervenues à compter du 1er janvier 2025, et notamment aux premières cessions intervenues dans le cadre d’un contrat de cessions échelonnées, réalisées à compter de cette même date.
Concernant l’exonération de plus-values sur la transmission de PME (CGI, art. 238 quindecies), le seuil de 500 000 € pour une exonération totale serait porté à 700 000 € et celui d’1 M€ pour une exonération partielle à 1,2 M € en cas de reprise de l’exploitation agricole par un JA (PLF, art. 19, I, F et III, B). Le dispositif serait ouvert aux cessions réalisées au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2025.
Pour l’exonération de droits de mutation en cas de transmission à titre gratuit de biens ruraux donnés à bail à long terme et de parts de GFA (CGI art. 793 bis), le seuil actuel de 500 000 € en cas d’engagement de conservation pour 10 ans serait porté à 600 000 € en cas de transmission à un JA (PLF, art. 19, I, G et II, C). Le dispositif s’appliquerait aux baux conclus à compter du 1er janvier 2025.
Une dernière mesure, qui tient plus de la logique juridique, consisterait à rehausser le seuil micro-BA pour les GAEC, qui serait porté à 480 000 € contre 367 000 € actuellement (PLF, art. 19, I, A). Le seuil individuel des micro-BA a en effet été revalorisé l’année dernière de 91 900 € à 120 000 € sans que le seuil applicable à ces groupements ne soit modifié en conséquence.
AN, Projet de loi de finances pour 2025 n° 324, 10 oct. 2024
Site EditionsLégislatives 11/10/2024