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Non-inscription à l’Inpi de la cession d’un fonds de commerce incluant une marque : quelle sanction ?

Non-inscription à l’Inpi de la cession d’un fonds de commerce incluant une marque : quelle sanction ?

L’exigence de l’inscription à l’Inpi d’une cession de fonds de commerce incluant une marque ne vise que l’inscription du privilège du vendeur du fonds, et ce, sous peine d’inopposabilité de la sûreté et non de nullité de la cession de marque.

 

Avant la réforme des sûretés de 2021, outre les formalités d’inscription au registre du commerce et des sociétés mentionnées à l’article L 143-16 du Code de commerce (inscription ou radiation du privilège du vendeur ou du créancier gagiste), la cession d’un fonds de commerce comprenant des marques, des dessins ou modèles industriels, tout comme le nantissement d’un fonds de commerce comprenant des brevets d’invention ou licences, des marques ou des dessins et modèles, devaient être inscrits à l’Inpi, dans les 15 jours de l’inscription au RCS, à peine de nullité à l’égard des tiers, de la cession ou du nantissement en ce qu’il s’applique aux brevets, licences, marques, dessins et modèles.

Dans un cas où il était soutenu que, en raison d’une inscription tardive à l’Inpi de la cession du fonds de commerce comprenant une marque, la cession de cette marque était nulle, la Cour de cassation a rejeté cette lecture littérale du texte précité et en a précisé la portée.

L’article L 143-17 du Code de commerce, qui figure à la section II, intitulée « Des formalités d’inscription et de radiation », du chapitre III « Dispositions communes à la vente et au nantissement du fonds de commerce » du titre IV « Du fonds de commerce », a pour finalité d’informer les tiers de la constitution d’une sûreté portant sur un fonds de commerce incluant des marques. La doctrine et les juges du fond en ont déduit que la sanction prévue par cette disposition était l’inopposabilité de la sûreté non inscrite à l’égard des tiers intéressés, et non la nullité de la cession, solution à laquelle devrait conduire l’interprétation littérale de ce texte.

Si toute recherche de la volonté du législateur par voie d’interprétation est interdite au juge lorsque le sens de la loi, tel qu’il résulte de sa rédaction, n’est ni obscur ni ambigu, et doit par conséquent être tenu pour certain, il y a cependant exception si l’application du texte aboutit à quelque absurdité. Ainsi, les termes « les ventes ou cessions comprenant des marques […] doivent être inscrits à l’Inpi » doivent être interprétés comme exigeant uniquement l’inscription à l’Inpi du privilège du vendeur d’un fonds de commerce. En effet, d’une part, il y aurait quelque absurdité à exiger que l’inscription des « ventes ou cessions » à l’Inpi soit subordonnée à l’inscription préalable prévue à l’article L 143-16 du Code de commerce, laquelle a un objet différent, limité à l’inscription des sûretés, et ce d’autant que l’acquéreur d’un fonds de commerce incluant une marque se trouverait dans l’impossibilité d’initier l’inscription de ces « ventes ou cessions » en vue d’assurer leur régularité, l’article R 143-6 du même Code prévoyant que seuls le vendeur et le créancier nanti ont qualité pour demander l’inscription préalable qu’il prévoit auprès du greffe. D’autre part, rien ne justifie que le privilège du vendeur d’un fonds de commerce comprenant des titres de propriété industrielle ne soit pas soumis à l’obligation d’inscription auprès de l’Inpi, quand l’article L 143-17 prévoit expressément l’inscription du nantissement d’un tel fonds. Par ailleurs, le propre de la nullité est d’emporter pour conséquence que l’acte nul est censé n’avoir jamais existé pour quiconque, et pas pour les seuls tiers. Dès lors, l’indication, à l’article L 143-17 du Code de commerce, que la nullité de la vente, de la cession ou du nantissement venant sanctionner le défaut d’inscription de cet acte dans le délai imparti ne vaut qu’à l’égard des tiers doit être considérée comme obscure. Il doit encore être relevé que l’interprétation littérale de ce texte aboutirait à un résultat paradoxal dès lors que l’article L 714-7 du Code de la propriété intellectuelle ne sanctionne que par l’inopposabilité aux tiers l’absence de publication de toute transmission ou modification des droits portant sur une marque. Il y aurait donc également quelque absurdité à annuler, en application de l’article L 143-17, en raison du retard de sa publication, une transmission des droits portant sur une marque comprise dans un fonds de commerce. Enfin, la réforme du droit des sûretés de 2021 a modifié l’article L 143-17 en ce sens que l’inscription au registre national des marques de la vente, de la cession ou du nantissement du fonds de commerce comportant une ou plusieurs marques est désormais prévue à peine d’inopposabilité à l’égard des tiers. L’absence d’inscription dans le délai entraîne, non la nullité de la cession de marque, mais l’inopposabilité de la sûreté, y compris en application de l’ancienne rédaction de ce texte.

à noter : La Cour de cassation fait primer l’esprit de la loi sur la lettre de celle-ci, afin de pallier les conséquences d’une rédaction malheureuse de l’article L 143-17 du Code de commerce. La doctrine considérait déjà que la « nullité à l’égard de tiers » prévue par ce texte devait être comprise comme une inopposabilité au tiers limitée aux éléments pour lesquels l’inscription à l’Inpi est nécessaire, à savoir, au privilège du vendeur (en cas de cession) ou au privilège du créancier nanti (en cas de nantissement).

A cet égard, le régime est désormais, sans contestation possible, identique que ce soit avant ou après la réforme des sûretés (issue ord. 2021-1192 du 15-9-2021) entrée en vigueur le 1er janvier 2022.

Il est à préciser que dans sa nouvelle rédaction, l’article L 143-17 prévoit expressément l’inopposabilité aux tiers, celle-ci vise toujours les « ventes, cessions ou nantissements ». La clarification apportée par la Cour de cassation demeure donc utile sur ce point : c’est la sûreté qui est inopposable et non la cession.

Cass. com. 26-6-2024 n° 23-11.020 FS-B, Sté MGT c/ Sté X – L’@ctualité en ligne, www .efl.fr 30/08/2024

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