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Mise en demeure de régler les fermages impayés : quelles sont les mentions obligatoires ?

L'article L. 411-31, I, 1°, du code rural et de la pêche maritime impose, à peine de nullité, de rappeler les termes de ses dispositions dans la mise en demeure de régler les fermages impayés adressée au preneur.

La résiliation du bail rural statutaire ne peut être prononcée que pour certaines fautes, limitativement énumérées par l’article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime. Le défaut de paiement du fermage figure parmi les motifs admis par la loi. Cependant, l’article L. 411-31, I, 1°, du code rural et de la pêche maritime ne sanctionne par la résiliation du bail les retards dans le paiement des fermages que si certaines conditions sont remplies. Il faut ainsi, d’une part, deux défauts de paiement de tout ou partie du fermage ou de la part des produits revenant au bailleur (Cass. soc., 29 avril 1960 : Bull. civ. IV, n° 328). D’autre part, il faut que les deux défauts de paiement aient persisté à l’expiration d’un délai de trois mois après mise en demeure (C. rur., art. L. 411-31, I, 1°). La mise en demeure est soumise à des conditions de forme très strictes. Elle doit être faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (C. rur., art. R. 411-10). Elle doit également reproduire, à peine de nullité, les termes de l’article L. 411-31, I, 1°, du code rural et de la pêche maritime relatif à la résiliation pour défaut de paiement du fermage. Cette dernière exigence mérite attention. En effet, il a été jugé qu’à défaut, la mise en demeure ne peut pas fonder la demande de résiliation du bail (Cass. 3e civ., 13 sept. 2018, n° 17-14.301 : Bull. civ. III, n° 99). De même, la reproduction, dans la mise en demeure, des dispositions de l’article L. 411-53 du code rural et de la pêche maritime ne peut fonder une demande de résiliation du bail (Cass. 3e civ., 7 sept. 2017, n° 16-19.874 : Bull. civ. III, n° 97).

Cette dernière solution connaît une nouvelle illustration jurisprudentielle avec un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 12 octobre 2022.

L’espèce peut être résumée de la manière suivante. Des baux ruraux à long terme sont consentis par actes authentiques des 2 octobre et 2 décembre 1992 sur des terres et bâtiments, moyennant un fermage payable le 10 mai et le 11 novembre de chaque année. Par deux lettres recommandées avec demande d’avis de réception des 15 mai et 16 août 2018, le bailleur met le preneur en demeure de régler le fermage du mois de mai 2018. Par deux nouvelles lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 17 novembre 2018, il le met à nouveau en demeure de lui payer les échéances des mois de mai et novembre 2018. Les sommes réclamées n’ayant pas été payées, le bailleur saisit finalement le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail, expulsion du preneur et paiement des fermages.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre l’arrêt de la cour d’appel de Bourges du 5 novembre 2022 rejetant cette demande. Les hauts magistrats observent ainsi que les juges du second degré ont relevé que l’ordonnance n° 2006-870 du 13 juillet 2006 avait eu pour objet de remédier au dispositif complexe et illogique qui résultait de ce que le droit de poursuivre la résiliation du bail ressortait de la combinaison de deux textes, à savoir l’article L. 411-53 du code rural et de la pêche maritime qui énonçait alors les différents cas de non-renouvellement du bail et l’article L. 411-31 du même code qui se bornait, pour la résiliation, à renvoyer à ces cas, et que l’ordonnance considérée avait pris le parti de faire entrer directement et explicitement ceux-ci dans le champ de la résiliation plutôt que dans celui du non-renouvellement en érigeant l’article L. 411-31 en texte autonome sans nécessité de renvoi à l’article L. 411-53. Ils les approuvent, dès lors, d’avoir exactement retenu que la référence dans les mises en demeure à l’article L. 411- 53 du code rural et de la pêche maritime était non seulement erronée mais inutile dans sa version modifiée et que la référence à un article L. 411-31, dont les termes rappelés ne correspondaient pas à ceux résultant de l’ordonnance du 13 juillet 2006, était également erronée. Aussi, ils estiment que la cour d’appel en a déduit, à bon droit et sans qu’elle soit tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que l’article L. 411-31, I, 1°, du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 13 juillet 2006, imposait à peine de nullité, de rappeler les termes de ses dispositions dans la mise en demeure adressée au preneur. Aussi, dès lors que le bailleur, nonobstant l’évocation de la possibilité de faire résilier le bail, n’avait pas satisfait à cette exigence en visant les textes dans des termes erronés, les mises en demeure délivrées devaient-elles être annulées.

Cass. 3e civ., 12 oct. 2022, n° 21-10.091, n° 701 D – Site EditionsLégislatives 11/04/2023

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