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Ordre des experts comptables

Matériel du bénéficiaire du congé reprise : en avoir ou pas ?

Toute reprise de terres affermés pour exploitation personnelle impose de posséder le matériel nécessaire à l'exploitation des biens ou de justifier avoir un financement pour l'acquérir.

L’article L. 411-59 du code rural et de la pêche maritime impose au bailleur exerçant son droit de reprise pour exploitation personnelle pour lui-même, ou au profit de son conjoint ou partenaire lié par un PACS ou encore d’un descendant majeur ou mineur émancipé, de justifier soit posséder le matériel nécessaire à la bonne marche de l’exploitation soit, à défaut, avoir les moyens de l’acquérir. Cette preuve peut être apportée par tout moyen, à la date d’effet du congé.

Un devis ou un bon de commande ne répond pas à l’exigence légale

Dans l’affaire ici commentée, après avoir constaté que le bénéficiaire de la reprise avait besoin de mobiliser 18 600 € avant de démarrer son exploitation, les juges du fond ont relevé qu’il ne justifiait d’aucune autre source de financement que sa demi-dotation de jeune exploitant d’un montant de 12 200 €. Pour la clôture du parcellaire, le bailleur ne produisait qu’un simple devis et un bon de commande. Quant à l’outillage, le bénéficiaire de la reprise se prévalait de la facture de réparation d’un tracteur sans que soit précisé l’identité de son propriétaire ainsi qu’une liste qui contenait, de toute évidence, essentiellement des outils destinés à son entreprise de charpente, exception faite de la débroussailleuse et du broyeur à végétaux.

Le matériel avec lequel le bénéficiaire de la reprise mènerait à bien son exploitation fourragère n’était pas non plus indiqué. Dès lors, les magistrats ont considéré qu’il ne possédait ni le matériel nécessaire au démarrage de l’exploitation ni les moyens de les acquérir.

Charge de la preuve

Par principe, c’est au bénéficiaire de la reprise de justifier qu’il possède le cheptel et le matériel nécessaires ou, à défaut, les moyens de les acquérir. Il n’appartient pas au preneur en place de prouver le manque de matériel pour l’exercice de la reprise envisagée ou l’absence de financement pour acquérir les éléments mobiliers requis pour conduire la prochaine exploitation des lieux (C. rur., art. L 411-59, al. 3).

La maîtrise de l’exploitation envisagée nécessite effectivement de détenir le matériel adapté à la mise en valeur des biens dès lors que le bailleur prend l’engagement de les exploiter durant les 9 prochaines années (C. rur., art. L. 411-59).

Appréciation in concreto rigoureuse

Le contrôle juridictionnel reste pointilleux par une appréciation in concreto de chaque situation. L’exigence d’avoir le matériel démontrant l’existence de moyens propres dont dispose le bénéficiaire de la reprise pour l’exploitation agricole des parcelles ou les moyens de l’acquérir est appréciée avec rigueur.

A ainsi été jugée insuffisante pour un bénéficiaire ne disposant d’aucun revenu ainsi qu’en attestaient ses avis d’imposition, la seule production du registre d’immobilisation auquel se trouvait annexée une liste manuscrite et dactylographiée intitulée « Liste matériel au 10 octobre 2019 » sans mention de son auteur et sans être confortée par d’autres pièces. L’attestation relative à la location de matériel à la SCEA dont il est associé à hauteur de 10 % des parts n’a pas non plus été jugée probante, société qui, de surcroît, ne détenait pas de matériel permettant l’exploitation des terres.

En revanche, la production de diverses factures et d’un relevé de compte bancaire justifiant que le bénéficiaire de la reprise, déjà installé, dispose de tout le matériel nécessaire en sa qualité d’exploitant individuel d’une superficie de 28 ha et possède des moyens financiers adéquats pour acquérir de nouveaux matériels, autorise la reprise des parcelles.

Quid quand le matériel est mis à disposition ?

La reprise a pu être refusée en présence d’une délégation des tâches d’exploitation à une entreprise agricole, quand la capacité financière était insuffisante et qu’en outre, le matériel dont le repreneur bénéficiait appartenait à une indivision dont il ne détenait qu’une quote-part de 15 % sans qu’une convention écrite en définisse les modalités d’usage.

Pourtant, la presse économique relève le suréquipement chronique de nos agriculteurs pour des questions fiscales et sociales, afin d’encourager les modes d’exploitation en commun de matériel.

La reprise exercée au profit d’un ouvrier agricole a été validée quand ce dernier pouvait, d’une part, dans un premier temps, utiliser le matériel de son employeur, puis celui de la coopérative d’utilisation de matériel en commun (CUMA) et, d’autre part, prétendre à l’aide accordée aux jeunes agriculteurs.

Site EditionsLégislatives 03/06/2024

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