Champ d'application, demande d'autorisation, instruction de la demande, contentieux...Le point sur les principales modifications apportées à l'autorisation environnementale par la loi du 10 mars 2023.
Plusieurs dispositions de la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables modifient le régime de l’autorisation environnementale, soit de manière générale, soit en y apportant des dispositions spécifiques concernant les installations de production d’énergies renouvelables.
Deux nouvelles autorisations fusionnées dans l’autorisation environnementale
L’article 61 de la loi modifie l’article L. 181-2 du code de l’environnement en ajoutant à la liste des autorisations intégrées dans l’autorisation environnementale :
– l’autorisation unique et l’agrément prévus respectivement aux articles 20 et 28 de l’ordonnance du 8 décembre 2016 relative aux espaces maritimes relevant de la souveraineté ou de la juridiction de la République française, lorsqu’ils sont nécessaires à l’établissement des ouvrages de raccordement aux réseaux publics d’électricité afférents ;
– l’arrêté d’approbation de la convention de concession d’utilisation du domaine public maritime situé en dehors des limites administratives des ports, lorsqu’il est nécessaire à l’établissement d’installations de production d’énergie renouvelable en mer ou des ouvrages de raccordement aux réseaux publics d’électricité afférents ainsi qu’à l’établissement des ouvrages d’interconnexion avec les réseaux électriques des Etats limitrophes.
Articulation des procédures d’évaluation environnementale au cas par cas et de demande d’autorisation environnementale
L’article 12 de la loi modifie l’article L. 181-5 du code de l’environnement qui porte sur la phase en amont du dépôt de la demande d’autorisation environnementale.
L’article est réécrit dans le but de mieux faire apparaître la distinction entre, d’une part, la demande d’examen au cas par cas au titre de l’évaluation environnementale et, d’autre part, les échanges préalables au dépôt de la demande d’autorisation environnementale qui constituent une faculté ouverte aux porteurs de projets.
Suppression du certificat de projet
Auparavant, en amont du dépôt de la demande d’autorisation environnementale, le porteur de projet pouvait faire établir un certificat de projet. Cela se traduisait par un courrier adressé par les services de l’État qui, notamment, identifiait les régimes auxquels le projet envisagé était soumis, décrivait les principales étapes de l’instruction, donnait la liste des pièces requises ainsi que, notamment, les éléments de nature juridique ou technique d’ores et déjà détectés comme pouvant faire obstacle à la réalisation du projet.
L’article 5 de loi loi abroge l’article L. 181-6 du code de l’environnement qui prévoyait le certificat de projet.
Remarque : en parallèle, les termes des articles L. 181-5 et L. 517-1 du code de l’environnement qui y faisaient référence sont supprimés.
Selon l’amendement à l’origine de la suppression, le certificat de projet était peu utilisé et constituait une charge supplémentaire pour les services déconcentrés travaillant sur l’instruction des demandes d’autorisation environnementale.
Expérimentation portant sur la compétence des bureaux d’études
Concernant l’autorisation environnementale ICPE des installations de production d’énergies renouvelables, l’article 10 de la loi instaure une expérimentation de 4 ans avec des bureaux d’études et des porteurs de projets volontaires.
Lorsque le maître d’ouvrage recourra aux services d’un bureau d’études interne ou externe pour l’élaboration de l’étude d’impact ou de l’étude de dangers, en vue de l’autorisation environnementale ICPE d’une installation de production d’énergie renouvelable, il s’assurera de la compétence de ce bureau d’études au regard d’exigences minimales fixées par arrêté du ministre chargé des installations classées. La compétence du bureau d’études pourra être attestée ou certifiée par des tierces parties.
Prise en compte des éoliennes existantes pour prévenir les effets de saturation visuelle
L’article L. 515-44 du code de l’environnement, relatif aux éoliennes, est modifié par l’article 2 de la loi.
Pour ces installations, l’autorisation environnementale ICPE doit également tenir compte, le cas échéant, du nombre d’installations terrestres de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent déjà existantes dans le territoire concerné, afin de prévenir les effets de saturation visuelle en vue de protéger les intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement.
Introduite par amendement, la disposition vise à reconnaître explicitement les efforts déjà accomplis par certains territoires en faveur des énergies renouvelables, à encourager dans ces territoires la diversification des sources de production d’énergies renouvelables. Elle vise en outre à inscrire dans la loi la notion de saturation visuelle pour préserver les paysages.
Remarque : il reviendra peut-être au juge de préciser la notion de “saturation visuelle”, que le texte ne définit pas.
Encadrement de la phase d’examen de la demande d’autorisation environnementale
Les articles 5 et 7 de la loi modifient la phase d’instruction de l’autorisation environnementale.
Il est désormais prévu à l’article L. 181-9 du code de l’environnement que le préfet peut rejeter la demande au cours (et non plus à l’issue) de la phase d’examen lorsque celle-ci fait apparaître que l’autorisation ne peut être accordée en l’état du dossier ou du projet.
En outre, le même article prévoit, concernant précisément les projets d’installations de production d’énergies renouvelables et dans la stricte limite des zones d’accélération pour l’implantation d’installations terrestres de production d’énergies renouvelables, que la durée maximale de la phase d’examen est de trois mois à compter de la date d’accusé de réception du dossier. Elle peut être portée à quatre mois sur décision motivée de l’autorité compétente.
En facilitateur, un référent préfectoral à l’instruction des projets nécessaires à la transition énergétique
Autre nouveauté, introduite par l’article 6 de la loi : la création du référent préfectoral à l’instruction des projets d’énergies renouvelables et des projets industriels nécessaires à la transition énergétique. Un nouvel article L. 181-28-10 prévoit en effet qu’un référent à l’instruction desdits projets sera nommé par le représentant de l’État dans le département, parmi les sous-préfets.
Le référent sera chargé de :
– faciliter les démarches administratives des pétitionnaires ;
– coordonner les travaux des services chargés de l’instruction des autorisations ;
– faire un bilan annuel de l’instruction des projets sur son territoire ;
– fournir un appui aux collectivités territoriales dans leurs démarches de planification de la transition énergétique.
Les missions attribuées au référent seront précisées par voie réglementaire.
Évaluation environnementale et rééquipement d’une installation de production d’énergies renouvelables
L’article 9 de la loi dispose qu’en cas de rééquipement d’une installation de production d’énergies renouvelables, les incidences que le projet est susceptible d’avoir sur l’environnement doivent être appréciées au regard des incidences notables potentielles résultant de la modification ou de l’extension par rapport au projet initial.
Remarque : la notion de “rééquipement” n’est pas définie par la loi, mais il s’agit d’un terme amplement employé par le règlement européen du 22 décembre 2022 établissant un cadre en vue d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables, en ce qui concerne spécifiquement les centrales électriques.
Cette disposition s’applique pour une durée de 18 mois à compter du 10 mars 2023, soit jusqu’au 10 septembre 2024.
Contentieux de l’autorisation environnementale : vers davantage de régularisations
L’article 23 de la loi modifie l’article L. 181-17 du code de l’environnement, en imposant à l’auteur du recours contre une autorisation environnementale de notifier son recours à l’auteur de la décision et au bénéficiaire de la décision, à peine d’irrecevabilité.
Remarque : les conditions d’application de cette disposition seront précisées par décret.
Par ailleurs, l’article L. 181-18 est également modifié. Dans sa nouvelle version, il est applicable aux litiges engagés à compter du 11 mars 2023 à l’encontre des autorisations environnementales régies par les article L. 181-1 et suivants du code de l’environnement.
Il impose désormais au juge (alors qu’il ne s’agissait avant que d’une simple faculté), dès lors qu’un vice n’affecte qu’une phase de l’instruction de la demande d’autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, de limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l’annulation qu’il prononce et de demander à l’autorité administrative compétente de reprendre l’instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d’irrégularité.
En outre, si un vice entraînant l’illégalité de cet acte est susceptible d’être régularisé, le juge doit désormais surseoir à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation. Si une telle mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations.
Enfin, dorénavant, le refus par le juge de faire droit à une demande d’annulation partielle ou de sursis à statuer devra être motivé.
Site EditionsLégislatives 24/03/2023