Des dispositions de la loi « influenceurs » du 9 juin 2023, qui créaient de nouvelles obligations à la charge des fournisseurs de services numériques alors que ces obligations entrent dans le champ d’application du DSA (règlement sur les services numériques), sont supprimées.
La loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole (dite « DDADUE 4 ») habilite le Gouvernement à modifier par ordonnance, dans un délai de 9 mois, la loi « influenceurs » du 9 juin 2023 (Loi 2023-451 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux).
Cette loi a, notamment, soumis les influenceurs aux mêmes obligations que tous les annonceurs, leur a interdit de faire de la publicité pour certains produits (la chirurgie esthétique, par exemple) et les a contraints à informer les internautes sur le caractère promotionnel de leurs communications (BRDA 13/23 inf. 23).
Certaines de ses dispositions ont cependant été adoptées par le Parlement français en méconnaissance de la procédure européenne imposant aux Etats membres de l’Union européenne de notifier à la Commission européenne les textes pris dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information et de respecter une période de statu quo entre cette notification et l’adoption définitive du texte (Dir. UE 2015/1535 du 9-9-2015, dite « directive SMTD).
D’autres dispositions de la loi « influenceurs » se sont par ailleurs révélées incompatibles avec le droit européen. Notamment, en ce qu’elles s’appliquent aux influenceurs établis hors de France, elles sont contraires au principe suivant lequel l’entreprise qui fournit un service dans d’autres pays de l’UE est soumise exclusivement au droit de son pays d’établissement, sans avoir à se conformer à d’autres législations nationales éventuellement plus contraignantes, sauf exception (principe du « pays d’origine » , figurant notamment dans la directive 2000/31 du 8-6-2000 sur le commerce électronique et dans la directive 2018/1808 du 14-11-2018 modifiant 2010/13 du 14-11-2018 – directive « SMA », ces deux textes étant susceptibles de s’appliquer à l’activité d’influence commerciale).
Pour la CJUE, la possibilité de déroger à ce principe n’a en effet pas été conçue pour permettre aux États membres d’adopter des mesures générales et abstraites visant à réglementer une catégorie de prestataires de services de la société de l’information dans son ensemble (CJUE 9-11-2023 aff. 376/22, rendu dans le cadre de la directive sur le commerce électronique).
Afin de remédier à ces défauts dénoncés par la Commission européenne (lettre adressée au Gouvernement français le 14-9-2023), la loi habilite donc le Gouvernement à mettre certaines dispositions de la loi « influenceurs » en conformité avec le droit européen, notamment : l’article 1, qui définit l’activité d’influence commerciale ; l’article 2, qui encadre l’exploitation commerciale des enfants de moins de 16 ans ; l’article 4, qui interdit la promotion de certains biens et services considérés comme dangereux pour le consommateur ; l’article 5 qui impose aux influenceurs faisant la promotion d’un produit ou d’un service d’indiquer la mention « publicité » ou « collaboration commerciale » sur l’image ou la vidéo ; l’article 9, qui oblige certains influenceurs établis en dehors de l’UE, de la Suisse ou de l’EEE de désigner un représentant sur le territoire de l’UE.
Aucun projet d’ordonnance n’a encore été rendu public mais on peut imaginer que les modifications apportées à ces dispositions consisteront pour l’essentiel à en circonscrire la portée. Selon les travaux parlementaires (Rapport Sén. no 213 sur l’art. 3 du projet), ces précisions pourraient porter sur la définition de l’influenceur, la nature des activités dont la promotion est interdite, la suppression des mentions indiquant l’intention commerciale de la publication pendant toute la durée du visionnage de la vidéo, la précision suivant laquelle ne sont concernés par l’obligation de désigner un représentant que les influenceurs ciblant un public établi en France (outre les autres conditions posées par ce texte).
La loi DDADUE 4 supprime par ailleurs certaines dispositions de la loi « influenceurs », qui créaient de nouvelles obligations à la charge des fournisseurs de services numériques alors que ces obligations entrent dans le champ d’application du règlement sur les services numériques (Règl. 2022/2065 du 19-10-2022, dit « DSA ») et que ce dernier, d’application directe et d’harmonisation totale, n’appelle pas l’adoption d’autres mesures d’application que celles qu’il prévoit explicitement.
Sont visées :
– l’article 10 (mise en place d’un mécanisme de signalement du contenu illicite et d’un rapport sur les activités de modération) ;
– l’article 11 (traitement des notifications soumises par des « signaleurs de confiance » ;
– l’article 12 (obligation de donner suite aux injonctions des autorités judiciaires et administratives) ;
– l’article 15 (adoption de protocole visant à favoriser la collaboration entre l’Etat et les plateformes) ;
– l’article 18 (dispositions de droit transitoire relatives aux dispositions supprimées).
Ces dispositions n’étaient pas encore entrées en vigueur de sorte que ces suppressions sont sans incidence pratique.
Loi 2024-364 du 22-4-2024 art. 3 : JO 23 texte n° 1 – L’@ctualité en ligne, www .efl.fr 07/05/2024