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Des ostréiculteurs condamnés pour travail dissimulé par dissimulation d’activité

Une activité de restauration devenue majoritaire ne peut être considérée comme le prolongement de l'activité de production ostréicole. Au regard de l'article L. 8221-3 du code du travail, elle devait obligatoirement être déclarée au RCS.

Dans cette affaire, deux époux, co-gérants d’une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL), immatriculée au registre du commerce et des sociétés (RCS) au titre d’une activité d’ostréiculture, relèvant du régime de la mutualité sociale agricole (MSA), ont développé des prestations de dégustation sur le site de leur exploitation.

A la suite de deux contrôles effectués en août 2017 sur les lieux dédiés à cette activité de dégustation, les époux sont poursuivis et reconnus coupables de travail dissimulé par dissimulation d’activité. Ils sont notamment condamnés à des peines d’amende et à la confiscation des biens saisis ou placés sous scellés.

Pour condamner les époux du chef de travail dissimulé par dissimulation d’activité entre le 15 janvier 2014 et le 31 décembre 2017, la Cour d’appel de Bordeaux s’appuie notamment sur les éléments suivants :

– augmentation des achats d’alcool ( 8 910 bouteilles en 2017 contre 3 594 bouteilles en 2014),

– variation des dépenses pour l’achat de denrées alimentaires de 2014 à 2017 (selon les années, entre 11 324,84 € et 16 036,71 €),

– surface de l’établissement de restauration permettant de servir 222 couverts simultanément en salle et en terrasse, et travaux d’aménagement de ces locaux réalisés pour un montant global de 200 000 €,

– présence d’une centaine de poissons de mer dans les chambres froides de l’établissement, dont une trentaine de bars pêchés par l’un des époux dans des conditions et au moyen d’engins illégaux,

– achats de coquillages et d’huîtres auprès de producteurs extérieurs. Il ressort des auditions de salariés et des époux eux-mêmes qu’ils vendaient plus d’huîtres qu’ils n’en produisaient,

– progression du chiffre d’affaires (CA) de l’entreprise, reconstitué par les enquêteurs, lié à la seule activité de restauration passé de 389 788,50 € en 2014 à 929 560 € en 2017, soit entre 61 % et 72 % du CA global de la société.

Sur la base de ces éléments, la Cour d’appel constate que l’activité de dégustation a été majoritaire entre 2014 et 2017 alors qu’elle aurait dû, au regard des textes, demeurer secondaire, dans le prolongement de l’activité principale de production définie par l’objet de l’entreprise. Elle estime qu’au regard de l’article L. 8221-3 du code du travail, les co-gérants devaient obligatoirement faire les déclarations nécessaires au RCS et les déclarations impératives des salariés auprès de I’URSSAF, démarches qu’ils se sont volontairement abstenus de réaliser.

Les époux conteste la décision de la Cour d’appel devant la Cour de cassation. Ils avancent que l’infraction de travail dissimulé par dissimulation d’activité n’est caractérisée que lorsque la déclaration aux fins d’immatriculation au RCS est obligatoire. Or de leur point de vue l’activité de dégustation est par essence une activité agricole qui n’imposait aucune déclaration supplémentaire dans la mesure ou l’activité de production agricole était régulièrement déclarée.

La chambre criminelle de la Cour de cassation donne raison à la cour d’appel. Elle considère que cette dernière a caractérisé le délit de travail dissimulé par dissimulation d’activité en tous ses éléments constitutifs. Elle retient que :

– seules sont réputées agricoles les activités de culture marine et les activités exercées par un aquaculteur qui sont dans le prolongement de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation,

– la conchyliculture est une forme d’aquaculture et cette activité d’exploitation comprend notamment le captage, l’élevage, la finition, la purification, l’entreposage, le conditionnement, l’expédition ou la première mise en marché des produits (C. rur., art. L. 911-1),

– les co-gérants de l’EARL, dont l’objet déclaré est l’ostréiculture, ont procédé à la revente habituelle, d’une part, de poissons de mer, d’autre part, d’huîtres et coquillages achetés auprès d’autres producteurs, activités qui ne peuvent être regardées comme ayant pour support leur exploitation,

– les prestations de restauration ne peuvent être considérées comme le prolongement de l’activité de production ostréicole compte tenu de l’importance des moyens qui leur ont été consacrés, de la fréquence et du montant des achats pour revendre qu’elles ont nécessités, dépourvus de tout lien avec l’activité de production, et de leur prédominance sur l’activité de production d’un point de vue économique.

Cass. crim. , 29 nov. 2022 , n° 21-85.579 – Site EditionsLégislatives 05/12/2022

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