En prenant en compte douze facteurs, comme les phytos, l’acidification du sol ou l’érosion hydrique, une étude publiée dans Nature établit un diagnostic de sols dégradés, qui entraînent des conséquences pour l’agriculture et l’alimentation.
« Il a été établi qu’environ un dixième des terres agricoles européennes sont affectées par une dégradation élevée et très élevée des sols. » Le constat est tiré d’une étude publiée le 8 mai 2024 dans la revue Nature intitulée « Une modélisation unifiée des multiples voies de dégradation des sols en Europe. »
L’Espagne en tête
Parmi les pays les plus touchés, l’Espagne est en tête des pays avec les sols les plus dégradés, devant l’Italie, la Grèce et les Pays-Bas. La France vient ensuite, au même niveau que le Royaume-Uni ou le Portugal. En revanche, l’Allemagne se situe en bas de classement avec une dégradation de ses terres bien plus faible.
Les scientifiques se sont appuyés sur douze processus de dégradation des sols pour obtenir une vision générale. Ces données sont l’érosion hydrique, l’érosion éolienne, la perte de carbone organique du sol, la salinisation du sol, l’acidification du sol, le compactage du sol, le déséquilibre des nutriments du sol, la pollution du sol par les phytosanitaires, la pollution du sol par les métaux lourds, la dégradation de la végétation, la diminution des eaux souterraines et l’aridité. Autant de symptômes qui permettent de brosser un portrait global des terres européennes.
Les différents seuils de dégradation (élevé, très élevé…) ont été définis à partir de la littérature scientifique. Ils correspondent, selon les auteurs, aux situations où la productivité agricole est impactée. En assemblant les douze paramètres, les scientifiques ont ensuite créé un indice de multidégradation des terres.
Quel est le processus le plus polluant ? « Nos résultats ont révélé que la pollution des sols par les pesticides a, de manière surprenante, la plus grande empreinte spatiale au niveau continental », précisent les scientifiques. Au total, 52 % de la surface agricole est dans un « état critique ». L’étude explique cette omniprésence par « le très grand nombre de substances (des dizaines d’herbicides, d’insecticides et de fongicides) prises en compte dans les données modélisées du risque “pesticides” ».
Viennent ensuite les déséquilibres des nutriments du sol (39 % des sols), la pollution des sols par les métaux lourds (31 %) et l’aridité (26 %).
« Ces quatre processus de dégradation des sols peuvent être considérés comme les plus importants en termes d’empreinte spatiale, en gardant à l’esprit que chaque processus affecte plus d’un quart de l’agriculture européenne », étaye l’étude.
Phytos, nutriments et métaux lourds
La France n’échappe pas à la règle européenne : la pollution via des produits phytosanitaires, les déséquilibres des nutriments du sol et la pollution par les métaux lourds sont les trois principaux facteurs de pollution du territoire français.
En revanche, la salinisation de sols, la dégradation des végétaux la diminution des eaux souterraines et l’érosion éolienne restent très faibles par rapport aux autres processus de dégradation à l’échelle européenne.
Les scientifiques encouragent les politiques publiques à s’emparer de ces résultats qui « développent une base de référence paneuropéenne complète pour évaluer la multi-dégradation des sols en Europe. »
Le 10 avril dernier, le Parlement européen a adopté une position concernant la proposition de directive de la commission relative à « la surveillance et la résilience des sols ».
L’objectif affiché par l’Union européenne : aller vers une pollution zéro des sols et préserver des sols sains d’ici à 2050. Ce sera aux nouveaux députés issus des élections européennes de juin 2024 d’adopter ou non ce texte.
Site LaFranceAgricole – Actualités 23/05/2024
