Incitations fiscales, renforcement de l’accompagnement… Un rapport publié sur le site du ministère de l’Agriculture dévoile plusieurs pistes pour relever le défi du renouvellement des générations en agriculture.
60 % des chefs d’exploitation agricole sont susceptibles de partir à la retraite d’ici à 2035. Dans le même temps, le modèle familial recule. En 2022, plus du tiers (35 %) des installations aidées se faisait en dehors du cadre familial, un chiffre en augmentation depuis les années 2000. C’est le constat dressé par un rapport du CGAAER et de l’Inspection générale des finances publié le 7 novembre 2024 sur le site du ministère de l’Agriculture.
Si rien n’est fait pour favoriser davantage les installations de jeunes agriculteurs, le fossé entre le nombre de départs et d’installations continuerait à se creuser et l’agrandissement des exploitations de progresser anticipe le rapport. Il identifie plusieurs obstacles qui expliquent la difficulté rencontrée par le secteur agricole à installer davantage et formule plusieurs propositions.
Des fermes de plus en coûteuses
Si le rapport observe que les candidats à l’installation rencontrent des difficultés à accéder au foncier, ils ont aussi des difficultés à financer le bâti et le matériel. Le montant des dettes liées aux constructions agricoles a augmenté de 204 % en 20 ans alors que la valeur du matériel dans l’actif des exploitations a augmenté de 30 % entre 2000 et 2022.
« Alors que les bâtiments et aménagements représentent 27 % des actifs en élevage (stabulation…), en grandes cultures, c’est le matériel (mécanisation) qui pèse le plus dans l’actif de ces exploitations (20 %) » note le rapport. L’augmentation du nombre de normes liées à la production agricole explique l’augmentation du coût de construction et de modernisation des bâtiments d’exploitation. En 2022, la valeur patrimoniale moyenne des exploitations s’élevait à 373 617 €, les exploitations en élevage bovin valant trois fois plus que les exploitations en grandes cultures.
Des mesures pour alléger la fiscalité de la transmission
Pour lever ces freins, le rapport formule plusieurs propositions fiscales d’un montant évalué entre 38 et 47,5 millions d’euros.
15 millions d’euros de ce budget pourraient être ainsi dédiés à un taux réduit de la taxe sur la publicité foncière pour favoriser les sociétés de portage de foncier. Afin d’inciter les bailleurs à conclure des baux avec des jeunes agriculteurs, un crédit d’impôt à la souscription d’un contrat d’assurance visant à garantir le paiement du fermage et l’augmentation à 50 % de l’abattement du régime du microfoncier sont évoqués.
Des mesures visant plus spécifiquement l’installation de jeunes hors cadre familial sont mises sur la table. L’extension de l’exonération d’impôt sur la fortune immobilière (IFI) aux terres louées par bail à long terme conclu avec de nouveaux installés sans condition de parenté entre bailleur et preneur alors qu’aujourd’hui elle est seulement limitée à la location à un membre de la famille du bailleur. Le rapport évoque également l’ouverture plus large du bénéfice du taux réduit de la taxe sur la publicité foncière en supprimant la clause d’implantation en zone de revitalisation rurale (ZRR) et en rehaussant le seuil à 200 000 €. Une mesure estimée à 20,4 millions d’euros.
Un renforcement de l’accompagnement des repreneurs et cédants
Le rapport souligne également un manque d’accompagnement pour les jeunes souhaitant s’installer. Actuellement, 60 % des candidats abandonnent leur projet avant de le finaliser. Face à ce constat, le rapport recommande de renforcer le rôle des Points accueil installation (PAI) en créant des modules d’appui spécifiques et personnalisés dédiés à l’émergence de projets et à la recherche de foncier.
L’accompagnement des cédants doit être aussi renforcé selon le rapport. Les auteurs préconisent d’inclure dans le PAI un accompagnement spécifique selon leurs besoins.
De quoi alimenter les prochains débats
Auditionnée au Sénat le 6 novembre 2024, la ministre de l’Agriculture a évoqué ce rapport. Elle a expliqué que certaines des mesures fiscales mises sur la table pourraient être reprises en cours d’année budgétaire l’an prochain, sans dire si elle pensait vouloir les intégrer dans une éventuelle loi de finances rectificative pour 2025.
Des propositions qui pourraient aussi alimenter l’actuel projet de loi de finances qui comprend déjà des mesures pour favoriser la transmission ainsi que le débat de la prochaine loi d’orientation agricole. Le texte dont le parcours législatif avait été stoppé au moment de la dissolution de l’Assemblée nationale va poursuivre son chemin après avoir été voté par les députés. La conférence des présidents du Sénat a en effet coché la semaine du 11 décembre pour le début de l’examen du texte en commission. Il est attendu en séance publique à partir du 14 janvier jusqu’au 23 ou 24 janvier.
Site LaFranceAgricole – Actualités 08/11/2024