Le projet de loi de finances pour 2025 a été déposé à l’Assemblée nationale. Outre les mesures déjà annoncées telles les contributions exceptionnelles des plus grandes entreprises et des contribuables aux plus hauts revenus, le texte contient de nombreuses mesures techniques. Zoom sur certaines d’entre elles.
Fiscalité des particuliers
– Les tranches du barème de l’impôt sur les revenus de 2024 seraient revalorisées de l’inflation attendue sur 2024, soit 2 % (Projet art. 2). L’instauration d’un « filet fiscal » à 20 % d’imposition minimale pour les plus hauts revenus serait réalisée via une contribution « différentielle » pour les contribuables dont le revenu est supérieur à 250 000 € pour un célibataire et 500 000 € pour un couple. Le revenu considéré serait constitué du revenu fiscal de référence visé à l’article 1417, IV-1o du CGI, hors revenus exceptionnels, diminué des abattements autres que les abattements pour durée de détention en matière de plus-values mobilières, des bénéfices exonérés des entreprises situés dans certaines zones et des plus-values visées à l’article 150-0 B ter du CGI pour lesquelles le report d’imposition expire. La contribution serait majorée pour les contribuables dont ce revenu excède 330 000 € (célibataire) ou 660 000 € (couple). Elle s’appliquerait aux revenus de 2024, 2025 et 2026 (Projet art. 3).
– La définition du domicile fiscal en France prévue à l’article 4 B du CGI serait modifiée à la suite de l’arrêt du Conseil d’État du 5 février 2024 qui a fait prévaloir la notion de domicile du droit interne sur celle de résident au sens des conventions fiscales pour l’application de la retenue à la source sur les salaires. Ainsi, les personnes non résidentes au sens des conventions fiscales ne pourraient pas être considérées comme domiciliées en France (Projet art. 23).
– En matière de plus-values sur cession de droits sociaux, le dispositif de l’abattement fixe de 500 000 € pour les dirigeants partant à la retraite qui arrive à expiration le 31 décembre 2024 (CGI art. 150-0 D ter) serait reconduit jusqu’à fin 2031 (Projet art. 19).
– Le régime des bons de souscription des parts de créateurs d’entreprises (BSPCE) serait lui aussi modifié (CGI art. 163 bis G). Une distinction serait opérée entre le gain d’exercice (correspondant à la différence entre la valeur des titres souscrits au jour de l’exercice de bons et le prix d’acquisition fixé au jour de l’attribution de ces bons) et le gain de cession des titres souscrits en exercice des bons. Le gain d’exercice (avantage salarial) serait taxé au taux de 12,8 % ou, sur option, selon les règles de droit commun des traitements et salaires (si l’activité est exercée depuis moins de trois ans à la date de la cession des titres souscrits en exercice, taxation au taux de 30 % sans possibilité d’option) et soumis à la CSG sur les revenus du patrimoine. Le gain net de cession des titres souscrits en exercice des BSPCE serait imposé dans les conditions prévues pour les plus-values mobilières. Par ailleurs, les titres souscrits en exercice des BSPCE ne pourraient plus être inscrits ni sur un plan d’épargne salariale, ni sur un PEA (« classique » ou « PEA-PME »). Les BSPCE seraient eux-mêmes désormais inéligibles au plan d’épargne salariale tout comme au PEA. (Projet art. 25).
– Lors de la cession à compter du 1er janvier 2025 d’un logement loué meublé, les loueurs en meublé non professionnels devraient réintégrer pour le calcul de la plus-value immobilière imposable le montant des amortissements déduits pendant la période de location en application de l’article 39 C du CGI (Projet art. 24).
– Enfin, signalons que les prestations de rénovation énergétique et les travaux comprenant la fourniture ou l’installation d’une chaudière susceptible d’utiliser des combustibles fossiles dans les locaux d’habitation achevés depuis plus de deux ans ne pourraient plus bénéficier du taux réduit ou du taux intermédiaire de TVA prévus par les articles 278-0 bis A et 279-0 bis du CGI et relèveraient, par dérogation, du taux normal (Projet art. 10).
Fiscalité des entreprises
– La contribution exceptionnelle assise sur l’impôt sur les sociétés des grandes entreprises viserait les entreprises réalisant un chiffre d’affaires d’au moins un milliard d’euros. Pour le premier exercice clos à compter du 31 décembre 2024, son taux serait fixé à 20,6 %, porté à 41,2 % si le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à 3 milliards d’euros. L’exercice suivant, ces taux seraient réduits respectivement à 10,3 % et 20,6 %. Un mécanisme de lissage est prévu pour éviter les effets de seuils de chiffre d’affaires. Aucune créance d’impôt ni crédit ou réduction d’impôt ne pourraient être imputés sur le montant de cette contribution, laquelle ne serait pas déductible des résultats (Projet art. 11). À noter qu’une contribution exceptionnelle est également prévue pour les grandes entreprises de transport maritime relevant de la taxation au tonnage prévue à l’article 209-0 B du CGI (Projet art. 12).
– Les entreprises dont le chiffre d’affaires excède un milliard d’euros seraient soumises à une taxe de 8 % sur le montant de la réduction de capital réalisée, à compter du 10 octobre 2024, à la suite d’un rachat d’actions (rachat-annulation de titres). Cette taxe ne serait pas déductible des résultats (Projet art. 26).
– Le régime fiscal de faveur des restructurations d’entreprises serait adapté à la suite de l’ordonnance 2023-393 du 24 mai 2023 qui a réformé le régime en droit des sociétés. Rappelons que cette ordonnance a introduit en droit interne les fusions ou scissions sans échanges de titres et les scissions partielles. Elle a également modifié la définition des apports partiels d’actifs (Projet art. 17).
– La mise en œuvre de la réforme dite « Pilier 2 » pour l’’imposition minimale des entreprises multinationales prévue par la loi de finances pour 2024 serait aménagée pour tenir compte notamment de plusieurs précisions apportées par l’OCDE depuis cette date (Projet art. 13).
– La suppression progressive de la CVAE aménagée dans la loi de finances pour 2024 serait décalée de 3 ans. La baisse s’étalerait ainsi sur les années 2028 à 2030, les taux actuels étant reconduits pour les années 2025 à 2027 (Projet art. 15). En matière d’impôts locaux, on notera également une mesure très technique liée à la révision des valeurs locatives des locaux professionnels et au mécanisme de « planchonnement » mis en place pour atténuer les variations de valeurs à la suite de cette révision, dans le but de contrer la jurisprudence récente du Conseil d’État.
– Enfin, signalons une modification du nouveau régime zoné dit « France ruralités revitalisation », permettant notamment d’y inclure certaines communes situées auparavant en zone de revitalisation rurale (Projet art. 27) et plusieurs mesures en faveur des exploitants agricoles (transmission des exploitations, déduction pour épargne de précaution, impôts locaux, etc.) (Projet art. 18 et 19).
Texte AN n° 324 – L’@ctualité en ligne, www efl.fr 11/10/2024