Le vendeur professionnel ne saurait être considéré comme ayant rempli son obligation de conseil s’il ne s’est pas informé, avant la vente, des besoins de l’acheteur.
Un particulier achète un camping-car pour faire un voyage d’un an avec cinq de ses proches à travers le continent américain. A la livraison, il demande au vendeur d’installer des équipements complémentaires. L’essieu arrière du véhicule fléchit lors du voyage, ce qui est dû, révèle une expertise, à un excès de poids. L’acheteur demande la résolution de la vente et des dommages-intérêts, invoquant un manquement du vendeur et du fabricant à leur obligation d’information et de conseil sur le poids du véhicule.
La cour d’appel de Rennes rejette la demande pour les raisons suivantes : le véhicule livré conformément à la commande initiale était apte à l’usage prévu par l’acheteur ; la surcharge de poids résultait de l’installation à sa demande d’équipements optionnels après la livraison ; la facture de livraison comportait les mentions « attention au poids » et « chaque accessoire supplémentaire diminue la charge utile » ; si cette mention ne précisait pas le poids des équipements déjà installés, elle était suffisante pour attirer l’attention du client sur la charge du véhicule et particulièrement sur l’incidence de l’installation de nouveaux équipements sur le poids du véhicule, l’acheteur devant, en sa qualité de conducteur, surveiller la charge de son véhicule pour demeurer dans les limites de poids définies par son permis de conduire.
Cassation de cette décision par la Cour de cassation. Le vendeur professionnel est tenu, avant la vente, d’une obligation de conseil qui lui impose de se renseigner sur les besoins de l’acheteur afin d’être en mesure de l’informer sur l’adéquation entre le bien qui est proposé et l’usage qui en est prévu. La cour d’appel n’avait pas constaté que le vendeur s’était informé des besoins de l’acheteur et, en particulier, de la charge utile qui lui était nécessaire pour mener à bien son projet de voyage.
A noter : 1o L’obligation de conseil du vendeur professionnel, telle que définie ci-dessus, résulte d’une jurisprudence constante. Même si son client ne précise pas un usage spécifique du bien qu’il se propose d’acheter, le vendeur doit l’interroger sur l’usage prévu.
La Cour de cassation avait déjà jugé que le vendeur d’un abri de piscine, que le poids de la neige avait fait s’effondrer, n’était pas exonéré de son obligation de conseil du seul fait que l’abri fourni était conforme à la réglementation et qu’il avait avisé l’acheteur de la nécessité de ne pas laisser la neige s’y accumuler.
Dans le même esprit, la Cour de cassation refuse ici de prendre en compte le fait que le vendeur avait alerté l’acheteur sur le poids du camping-car et que l’acheteur devait, en tant que conducteur, surveiller ce poids.
Le vendeur professionnel est exonéré de son obligation de conseil à l’égard d’un acheteur connaissant les caractéristiques essentielles des biens vendus ou disposant, en qualité de professionnel, des moyens d’apprécier ces caractéristiques.
2o L’avant-projet de réforme du droit de la vente, diffusé par le Gouvernement en avril dernier, ne prévoit pas de codifier le devoir de conseil du vendeur professionnel. Il définit l’obligation d’information pesant sur tout vendeur dans les termes suivants (art. 1617) : le vendeur est tenu d’exprimer clairement ce qui se rapporte aux qualités et caractéristiques du bien qu’il cède ; dans cette mesure, les obscurités et ambiguïtés du contrat s’interprètent contre lui.
Cass. 1e civ. 11-5-2022 n° 20-22.210 F-B, X c/ Sté Bourcier
L’@ctualité en ligne, www .efl.fr 17/06/2022